Le temps Anbòkayman

Lettre à Manman Jwani

À Manman Jwani

Bonjour Manman Jwani,

Comme pour beaucoup de chose en ce moment, nous revenons à l’essentiel, en particulier en ce qui concerne le temps. Et, je me rappelle ce que tu me dis sans cesse : « on a toujours le temps, si on souhaite s’en donner pour ce qui compte pour nous et qui se partage. »

Aujourd’hui Manman Jwani, le temps il est dévolu à la famille, à l’art de la lenteur, à l’art de vivre au rythme du climat du ciel et de l’air, ainsi qu’à celui de nos cœurs pour trouver l’unisson. Alors, prendre le temps de t’écrire aujourd’hui, je le vis comme un privilège, car c’est à un temps de méditation sur notre relation que cela m’invite. Toi qui a toujours été là pour moi, pour nous.

Lévé lé bonmaten

Mwen lévé bonmaten-an, mwen pa té ké sa diw poutji, mé sèl bagay, ou té la. Sé tan-tala, tou sa ou toujou di mwen, mwen ka wèy, pani zafè séwé dèyè travay-la pou di kon tèl mwen pani tan. Mé kisa mwen té konnèt di tan-an ? Mwen-menm pé pa diw.

Oui Manman Jwani, révéw mwen révéw. J’étais dans le jaden. C’était la fin de journée. J’allais avec mon arrosoir, faisant des aller-retour pour arroser certaines plantes du jaden. En particulier, mes ti-karé potajé, et mon karé la mèdsin. Oui Manman Jwani, le Karenm est rude cette année. Tou pandan mwen ka alé-vini an jaden-an, mwen la ka sonjéw, ka wèw an jadenw ka wouzé osi. Sa ou ka fè, sé sa mwen ka fè, kon tèl mwen ka wèw ka fèy alòs ki sé mwen ki la ka fèy. Mi dé bagay. Mwen anni doubout la ka gadé jaden-an. Mwen rété di kò-mwen, jaden-mwen sé yich jaden’w, jès-mwen an jaden-mwen, sé jès ou an jaden’w, mwen sav ki sans sa ka pòté. Alala mi dé bagay.

Quand j’ai fini, je me suis assise avec doudou et les enfants pour vivre calmement sur la véranda, la fin de la journée. Les oiseaux se hâtaient avant la nuit. Les perroquets remontaient, trois malfini dessinaient leur dernière spirale avant la nuit, les tourterelles passaient ici et là cherchant leur partenaire, les rouj goj et èk sikriyé, respectivement suçaient les dernières hibiscus et grignotaient les dernières graines des herbes sèches, seuls les colibris ne semblaient pas pressés, et virevoltaient encore entre les roses de porcelaines, les balisiers et oiseaux du paradis. D’ailleurs, je me dis à ce moment là que je ne savais toujours pas où allaient les merles.

Manman, tu sais

Toutes les paroles que tu dis souvent comme un remède face à certaines situations de la vie, me sont venues comme un long plaidoyer de vivre-ensemble. Ça m’a vraiment ému. Car ta voix était mêlée à la mienne en discours dans mon coeur.

Mafi, il ne faut pas blâmer les contrariétés, wè mizè pa mò, sé monté désann, yann dèyè lòt, bèf douvan brè dlo klè, asiré pa pétèt, tété pa janmen tro lou pou lèstomak, bondjé pa ka baw ayen ou pé ké sa sipòté, maré renw, jou malè pani pran gad, krapon viv lontan, pran douvan avan douvan pranw, tjenbé kòw dwèt, bondjé bon, sé dé penn ki ni faché épi défaché, démaré fidjiw, lavi sé an bèl pasaj, an bout jadenw pani lapenn ankò yen ki bénédiksyon ki ni… Mafi viv-li bien… avec la grâce… Sé tout !

Pran pasians ych-mwen… pran pasians…. apré lapli sé solèy

Je te revois toujours égal à accepter les épreuves de la vie, la tienne et celles de tous ceux à qui tu es liée dans la vie du faire ensemble pour aller plus loin. Sans jamais les prendre pour toi, te confondre à eux. Je pense beaucoup à ta foi si douce de force, calmement tenace, tu vois venir tout jour avec son lot de bénédiksyon. Si ni lonbraj sé ki ni limiè.

Alors, tu comprends, même si tout cela nous a surpris, le confinement, l’impossibilité de venir te voir, de t’appeler à loisir. Chak moun bòkay-yo. Chak moun chak moun ka viv-li kon i pé. Heureusement que tu es dans notre coeur. Tout le monde a accepté la situation assez vite. Et nous nous sommes mis à faire ce qu’il faut pour le vivre au mieux. En tout cas, les enfants, ti-ych ou, sont ravis. Yo pa té ka mandé plis ki sa. Comme ils le disent pour une fois que nous sommes ensemble tous les jours. Bien sûr, ils pensent à toi. Tu es dans leur prière. Ils rêvent de la fin du confinement, où encore selon eux, nous serons obligés de réunir la famille autour de toi.

Toujours est-il que nous sommes là.

J’ai éprouvé toutes tes recettes au plus grand ravissement des enfants. Tellement que lorsque nous avons fait des pâtes l’autre jour, ils ont wouspété. Bien entendu, c’est pas comme Mamie Jwani…

Ah Manman Jwani, je pense à toi et je prie pour toi dans tout ce que je fais, tu es pour moi une source d’inspiration. Alors, garde ta lumière par ta positivité et ta foi bienveillante, tu es nôtre phare.

Où nous sommes c’est chez toi
Où tu es c’est chez nous
Nous sommes toujours ensemble…

Alors comme tu dirais à la force de l’amour : pran pasians ych-mwen… pran pasians…. apré lapli sé solèy.

Mwen enmenw Manman Jwani, tjè-mwen kontan….

 

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